suite ont des moyens d’action très limités. C’est
donc GMHC qui gère la lutte contre l’épidémie de fa?on ?centralisée??:
les taches administratives sont accomplies par des salariés et le
travail sur le terrain par des bénévoles, souvent issus des classes
moyennes, qui font ?uvre de générosité plus que de restauration de la
dignité et de la capacité d’action?: il se crée ainsi un rapport de
clientélisation et non de restitution des droits de citoyen. Cette
différence s’explique notamment par le lien historique entre l’émergence
de la communauté gaie et lesbienne sanfranciscaine et le mouvement
contestataire beatnik?[22] [22] Manuel Castells, The City and the
Grassroots?: A Cross-Cultural...
suite de sorte que ?le mouvement gai suit plut?t un schéma qui part de
la base [grassroots] en Californie,? écrivent Charles Perrow et Mauro
Guillén. Mais à New York, ?un modèle orienté du haut vers le bas
[top-down] prédomine nettement, dans lequel les gais sont moins unis et
?les chefs de file politiques gais [émergent] davantage de la préférence
des responsables publics? ainsi que des médias?[23] [23] Charles Perrow
et Mauro Guill233;n, The AIDS Disaster?: The...suite?.20 Cette
différence entre New York et San Francisco se reflète dans des
organisations telles que Gay and Lesbian Alliance Against Defamation
(GLAAD), qui lutte contre les représentations fallacieuses ou hostiles
des gais et lesbiennes dans les médias. Deux représentants
sanfranciscains de GLAAD critiquent, par exemple, le port du ruban
rouge, qui exprime un message de solidarité avec les victimes du SIDA
dénué de toute référence à l’homosexualité. L’un d’eux déclare ainsi?:21 ?C’est moins risqué pour des
personnalités hétéros de soutenir la lutte contre le SIDA que la lutte
contre l’oppression des gais et des lesbiennes. Mais les jeunes gais se
suicident trois fois plus que les jeunes hétéros, et c’est aussi une
épidémie?; et puis si je sors de cet immeuble et que je me fais casser
la figure avec une batte de base-ball parce que je tiens la main de mon
copain, c’est une épidémie de haine. Mais personne ne porte un ruban
rouge pour ?a.?22 Et sa camarade d’ajouter?: ?[porter un ruban rouge]
amène une séparation [entre les enjeux liés au SIDA et les enjeux des
gais et lesbiennes], et nous ne voulons pas d’une séparation?[24] [24]
Entretien, San Francisco, 27?mars 1993. ...
suite.? Dans une position proche de celle d’ACT?UP, ces militants
estiment donc que la question du SIDA et celle de l’homophobie sont
indissociables, et que le calcul consistant à traiter l’une séparément
de l’autre conduit à un discours inauthentique.23 à New York, une
représentante de la même organisation manifeste au contraire un profond
agacement pour toute question touchant l’impact du SIDA sur le mouvement
gai et lesbien, et ajoute?:24 ?Il faut s’attaquer […] à tout ce qui
nous empêche d’être représentés dans les médias comme des gens normaux
et tout à fait ordinaires [average, boring people]. Nous voulons que les
médias montrent l’ensemble de notre communauté, y compris la vie tout à
fait ordinaire et normale de la plupart d’entre nous?[25] [25]
Entretien, New York, 7?avril 1993. ...