Vous prononcez parfaitement bien, et c’est à quoi jetiens pardessus tout. Quel
age avezvous,mademoiselle ? Vous êtes vénitienne ? élève du célèbrePorpora, que
je vois ici avec intérêt ? Vous désirezentrer au théatre de la cour ? Vous êtes
faite pour ybriller ; et M. de Kaunitz vous protège. Ayant ainsi interrogé
Consuelo, sans attendre sesréponses, et en regardant tour à tour Métastase
etKaunitz, qui l’accompagnaient, MarieThérèse fit unsigne à un de ses
chambellans, qui présenta un braceletassez riche à Consuelo. Avant que celleci
e?t songé à remercier, l’impératrice avait déjà traversé la salle ; elleavait
déjà dérobé à ses regards l’éclat du front impérial.Elle s’éloignait avec sa
royale couvée de princes etd’archiduchesses, adressant un mot favorable
etgracieux à chacun des musiciens qui se trouvaient à saportée, et laissant
derrière elle comme une tracelumineuse dans tous ces yeux éblouis de sa gloire
et desa puissance. Caffariello fut le seul qui conserva ou qui affecta
deconserver son sangfroid : il reprit sa discussion justeoù il l’avait laissée ;
et Consuelo, mettant le braceletdans sa poche, sans songer à le regarder,
recommen?a àlui tenir tête, au grand étonnement et au grand scandaledes autres
musiciens, qui, courbés sous la fascination del’apparition impériale, ne
concevaient pas qu’on p?tsonger à autre chose tout le reste de la journée. Nousn’avons pas besoin de dire que le Porpora faisait seulexception
dans son ame, et par instinct et par système, àcette fureur de prosternation. Il
savait se tenirconvenablement incliné devant les souverains ; mais, aufond du
c?ur, il raillait et méprisait les esclaves. Ma?treReuter, interpellé par
Caffariello sur le véritablemouvement du ch?ur en litige, serra les lèvres d’un
airhypocrite ; et, après s’être laissé interroger plusieursfois, il répondit
enfin d’un air très froid : Je vous avoue, monsieur, que je ne suis point à
votre conversation. Quand MarieThérèse est devantmes yeux, j’oublie le monde
entier ; et longtemps aprèsqu’elle a disparu, je demeure sous le coup
d’uneémotion qui ne me permet pas de penser à moimême.Mademoiselle ne para?t
point étourdie de l’insignehonneur qu’elle vient de nous attirer, dit M.
Holzbaüer,qui se trouvait là, et dont l’aplatissement avait quelquechose de plus
contenu que celui de Reuter. C’est affaireà vous, signora, de parler avec les
têtes couronnées.
Ondirait que vous n’avez fait autre chose toute votre vie.Je n’ai
jamais parlé avec aucune tête couronnée,répondit tranquillement Consuelo, qui
n’entendait pointmalice aux insinuations de Holzbaüer ; et sa majesté nem’a
point procuré un tel avantage ; car elle semblait, enm’interrogeant, m’interdire
l’honneur ou m’épargner letrouble de lui répondre.Tu aurais peutêtre souhaité
faire la conversationavec l’impératrice ? dit le Porpora d’un air goguenard.Je
ne l’ai jamais souhaité, repartit Consuelona?vement.C’est que mademoiselle a
plus d’insouciance qued’ambition, apparemment, reprit le Reuter avec undédain
glacial.Ma?tre Reuter, dit Consuelo avec confiance etcandeur, êtesvous mécontent
de la manière dont j’ai chanté votre musique ? Reuter avoua que personne ne
l’avait mieuxchantée, même sous le règne de l’auguste et à jamaisregretté
Charles VI. En ce cas, dit Consuelo, ne me reprochez pas moninsouciance.
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