Il se différencie complètement de l’amour exogame qui comporte des
conséquences sexuelles. Non seulement il se distingue du désir, mais il
le contrarie, selon une opposition de départ entre le désir et l’amour.
En quel sens l’amour s’oppose-t-il au désir, non pas comme un résultat
du complexe d’338;dipe, mais comme une opposition présente dès le
débutxA0;? C’est que le désir d’enfant dépasse les parents qui en sont
porteurs. Ce désir aura été plus fort qu’eux. Et leur amour cherche à
réparer les dégats que cause ce désir trangénérationnel. Les parents ont
des enfants pour des raisons qui les dépassent. Lorsqu’ils les
éduquent, lorsqu’ils les font manger, les nettoient, etc.
, cette éducation pulsionnelle les dépasse et les traverse. Il leur
arrive de donner des ordres qui font pleurer les enfants, mais à peine
l’ont-ils fait qu’ils le regrettent et les consolentxA0;: un tel
mouvement montre bien l’opposition du désir et de l’amour parental.
Parce que leur propre attitude les dépasse, ils finissent par réparer ce
qu’ils ont eux-mêmes provoquéxA0;: ils ont pitié de leur enfant, si
l’on peut caractériser ainsi l’amour parental oblatif[8][8] L’opposition
de l’amour et du désir est habituellement...suite.7 Le désir des
parents représente d’abord le désir de l’AutrexA0;: ce n’est personne. La relation avec cet Autre objective, et de plus, son désir lui-même
est objectivant. Il plonge le sujet dans la détresse. La détresse de
l’enfant (hiflosigkeit) passe souvent pour une détresse physique, mais
il s’agit d’abord de la détresse psychique de n’être qu’un objet.
L’amour qui vient ensuite s’oppose à l’objectivation de ce désir, et
c’est pourquoi il est approprié de l’appeler xA0;amour pitiéxA0;,
oblatif. écoutez parler une mère à son enfant et vous entendrez toujours
cette note de pitié, de compensation accordée pour ce à quoi il a
servi. Lorsqu’une mère se rend compte du bourbier dans lequel elle
plonge son enfant et contre lequel il se débat, elle passe de la
position de grand Autre à la position de sujet. C’est le moment où un
enfant reconna?t sa mère, et est reconnu aussi par elle.
L’amour endogame débouche sur une reconnaissance de sujet à sujet. Mais
cette pitié manque de dignité pour celui à qui elle s’adresse. C’est
pourquoi elle engendre un contre-amour, qui s’oriente hors de la famille
en ignorant cet amour endogame indigne.8 L’amour pitié des parents
comble la part de néant qui résulte du narcissisme. La structure
objectivexA0;: elle est anéantissante, et l’amour vient contrer cet
anéantissement. Grace à lui l’enfant acquiert la force d’agir au dehors.
Le don d’amour des parents gonfle le narcissisme, qui peut aller se
dégonfler ailleurs.