Ils y transportent les courses des dames de la bourgeoisie dans de
vastes paniers d'osier. Plus grave, certains sont entra?nés dans de
minables trafics de drogue, voire dans la prostitution.Mohammed le
Chauve, ainsi nommé parce qu'il a perdu tous ses cheveux à la suite
d'une mystérieuse maladie, est allé plus loin que les autres. Jusqu'à
Bombay. Une expérience qui lui vaut, de retour à Delhi, d'être le chef
de la petite communauté de gamins qui campe non loin de la gare. ? Lui,
il a go?té l'eau de la mer et il dit qu'elle est salée ! lance Sunny,
admiratif. Au début, personne ne voulait le croire.
Mais il est trop fort ! Il avait raison. Maintenant, on lui fait tous
confiance. ?Satish, Sunny, Mohammed et les autres... L'Inde est malade
de ses petits pauvres. Et, lorsqu'il s'agit d'éradiquer le fléau
insupportable qu'est le travail des enfants, la superpuissance
économique en devenir a des pieds de plomb. Le 10 octobre dernier, une nouvelle loi est entrée en vigueur. Elle
interdit aux moins de 14 ans de travailler dans les restaurants, les
h?tels. Chez les particuliers, enfin, où ils seraient pourtant plus de
20 millions à effectuer de lourdes t?ches domestiques, les classes
moyennes montantes ayant souvent recours à cette main-d'oeuvre bon
marché. Tout contrevenant sera passible de deux ans de prison et d'une
amende de 20 000 roupies. En théorie, car la pratique, c'est une autre
histoire.? L'intention est bonne et tout cela part d'un bon sentiment,
mais comment voulez-vous mettre la main sur tous les enfants qui
travaillent de manière illégale ? ? s'énerve Sunita. La jeune femme est
employée dans l'une des nombreuses ONG indiennes qui tentent de mettre
un terme à l'? indignité que représente, pour le pays, le travail des
enfants.
? Qu'il s'agisse de ceux qui gagnent un semblant de vie dans les rues,
ou de ceux qui croupissent dans les usines, les ateliers clandestins,
les fabriques de tapis, d'allumettes etc.Jeune cadre dynamique, l'une
des rares femmes à occuper un poste à responsabilité dans la banque où
elle est employée, Geeta ne comprend pas où est le problème. Il y a
moins d'un an, elle a engagé Sandeep, 8 ans, pour s'occuper de son bébé
de 6 mois. Le petit gar?on épluche aussi les légumes et fait le ménage.
? Si, demain, je dois le renvoyer, que fera-t-il ? ?, s'exaspère Geeta.
? En plus, c'est un sale gosse. Parfois, quand je rentre, le bébé a des
traces de griffures ?, ajoute-t-elle.