A tort ou à raison, Pyongyang est convaincu que la Corée du Sud et sa
Sunshine Policy est de plus en plus réticente à exercer la moindre
pression sur elle, par souci de rapprochement et par crainte de voir sa
politique remise en question. Si tel était le calcul, il n'était pas
fameux non plus, car l'essai met le gouvernement sud-coréen, comme les
autorités chinoises, au pied du mur. On peut même dire que pour tous
deux, c'est un camouflet, qui pourrait conduire Pékin à se montrer plus
dure que de coutume avec Pyongyang.Enfin, il y a les élections
américaines et un autre dossier nucléaire, dont la Corée du Nord suit le
déroulement avec attention : celui de l'Iran. Washington traverse une
phase de faiblesse et de division politique évidente, et personne ne
peut prévoir les conséquences internationales de cette situation pour la
fin du mandat de l'Administration Bush. Parier sur l'impunité dans ces
circonstances serait naturel pour Pyongyang. D'autant que les nombreuses
tergiversations de la communauté internationale sur le programme
nucléaire iranien ne peuvent constituer qu'un encouragement
supplémentaire à tenter un coup de force.
Après tout, Téhéran n'a tenu aucun compte de la déclaration
présidentielle du Conseil de sécurité adoptée en mars et a tout autant
ignoré la résolution 1696 de juillet, sans avoir, pour le moment du
moins, subi la moindre conséquence.? présent, donc, au lieu d'une, ce
sont deux crises que les membres du Conseil de sécurité doivent traiter
en urgence, comme pour montrer qu'il ne suffit pas de repousser les
échéances pour voir les problèmes s'évanouir comme par enchantement.
Toute la question est de savoir s'ils prendront toute la mesure de la
gravité de la situation actuelle. Dans un monde déjà fortement
déstabilisé par les suites du conflit de cet été au Moyen-Orient, par la
permanence de la menace terroriste, par les activités de réseaux
clandestins vendant au plus offrant les éléments d'armes non
conventionnelles, l'aggravation soudaine de deux crises nucléaires
ressemble fort à un dernier avertissement.LA BOMBE atomique
nord-coréenne ne pouvait pas plus mal tomber pour New Delhi. Nombre
d'observateurs jugent qu'elle ?risque de faire capoter l'accord
de coopération sur le nucléaire ?civil, passé à grand-peine avec
Washington au printemps dernier. Un accord taillé sur mesure pour les
Indiens. Il devait faire sortir leur pays de son statut de paria nucléaire ;
permettre, surtout, à leur économie de faire face à ses immenses besoins
énergétiques ; consacrer, enfin, l'Inde dans son r?le de partenaire
privilégié des ?tats-Unis en Asie du Sud. Une place que Delhi ne veut se
laisser ravir à aucun prix.Un r?le de ?proliférateur?Ceci explique-t-il
cela ? L'Inde n'a pas perdu de temps pour tirer à boulets rouges sur le
Pakistan. La presse d'abord, mais aussi, de manière plus sibylline, le
gouvernement, dénon?aient, hier, le r?le de ? proliférateur ? joué par
Islamabad dans l'accession de la Corée du Nord au 9e rang des
puissancesnucléaires mondiales. Dénon?ant, notamment, l'impunité dont
jouit A.Q. Khan, le père de la bombeatomique pakistanaise.
Placé en résidence surveillée à Islamabad, le scientifique, qui est
accusé d'avoir vendu de la technologie nucléaire à l'Iran, la Libye et
la Corée du Nord, n'a jamais été livré aux Américains. Leurs services
n'ont même pas eu le droit de l'interroger. Guerre contre le terrorisme
en Afghanistan et chasse à Oussama ben Ladenobligent, Washington a
encore trop besoin du Pakistan pour se permettre le luxe de bousculer
Islamabad,même sur un dossier aussi br?lant.Malgré ? soixante ans de
théologie nucléaire ?, les grandes puissances occidentales ? ne savent
toujours pas comment s'y prendre avec un état nucléaire qui fait du
chantage, et où les terroristes menacent sérieusement les populations
des grandes démocraties ?, notait hier K. Subrahmanyam, le président du
Conseil de sécurité nationale du gouvernement de Delhi. Et, enfon?ant le
clou : ? Mais cette stratégie (du chantage), ce n'est pas la Corée du
Nord qui l'a inventée, c'est le Pakistan. Les ?tats-Unis ont perdu la
bataille de la prolifération nucléaire en Corée du Nord le jour où ils
ont accepté de négocier avec Musharraf ?.
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