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Cette fa?on de voir devient tellement populaire, notamment dans les années 1790, qu’elle fa?onne pour des décennies le regard porté par les classes moyennes et supérieures sur les paysages anglais. Au prix de la précision et des nuances développées par les penseurs du pittoresque, William Gilpin et Uvedale Price en tête. De ce dernier, qui publie ses deux volumes d’Essay on the Picturesque entre 1794 et 1798[11] [11] Uvedale Price, An essay on the Picturesque as compared with...suite, on retient essentiellement son insistance sur la variété des scènes représentées. Price replace la source du pittoresque dans les détails irréguliers, les surfaces rugueuses, et les textures grossières de la nature et de l’art, qui flattent l’?il par leur clair-obscur. [12] [12] « Price redefined the source of the picturesque as those...suite L’accent est mis sur l’irrégularité, les bosquets, ruines, arbres tordus, rivières sinueuses qui brisent la monotonie d’une vue. S’adressant aussi aux concepteurs de parcs, Price s’inscrit toujours dans l’idée d’une nécessaire construction du paysage, ne serait-ce que par la quête du point de vue juste.6 Dans la vulgarisation de la théorie pittoresque, la particularité de chaque paysage mise en avant par William Gilpin ou Richard Payne Knight vient à se perdre dans l’uniformité des regards portés sur elle[13] [13] Ann Bermingham, Landscape and Ideology : The English Rustic.. .suite. Le voyage dans le domaine des Lacs devient ainsi un impératif pour tout touriste de la fin du xviiie siècle et du début du xixe siècle. On y cherche les vues suggérées par Thomas West dans son guide publié en 1778, et tellement populaire qu’il en est à sa dixième édition en 1812[14] [14] Thomas West, A Guide to the Lakes […] in Cumberland, Westmorland...suite. Le pittoresque à ce moment là est devenu une convention et les fa?ons de voir le paysage totalement formalisées[15] [15] Esther Moir, The Discovery of Britain : The English Tourists,...suite. C’est notamment contre cela que vient s’élever le romantisme, sans pour autant parvenir à bouleverser complètement des habitudes visuelles déjà bien ancrées dans les mentalités. Wordsworth, en particulier, cherche à redonner vie à l’esprit de chaque endroit, en insistant sur le lien émotionnel, spirituel même parfois, qui peut s’établir entre le voyageur, qui dans l’idéal n’est plus seulement un spectateur mais un participant au lieu, et le paysage qu’il découvre. L’attention au détail – déjà en germe dans certaines versions du pittoresque – est plus poussée (et Wordsworth, comme la plupart de ses contemporains, avait une bonne connaissance de l’histoire naturelle), et l’accent est mis sur l’expérience vécue du lieu