En descendant, elle remettait les clefs de la chambre de Valentine à M. de
Villefort lui-même, de sorte qu'on ne pouvait plus entrer chez la malade qu'en
traversant l'appartement de Mme de Villefort et la chambre du petit ?douard.
Chaque matin Morrel venait chez Noirtier prendre des nouvelles de Valentine :
mais Morrel, chose extraordinaire, semblait de jour en jour C. L'apparition..
162 Page 167 Le Comte de Monte-Cristo, Tome IV moins inquiet. D'abord, de jour
en jour Valentine, quoique en proie à une violente exaltation nerveuse, allait
mieux puis, Monte-Cristo ne lui avait-il pas dit, lorsqu'il était accouru tout
éperdu chez lui, que si dans deux heures Valentine n'était pas morte, Valentine
serait sauvée . , Or, Valentine vivait encore, et quatre jours s'étaient écoulés. Cette
exaltation nerveuse dont nous avons parlé poursuivait Valentine jusque dans son
sommeil, ou plut?t dans l'état de somnolence qui succédait à sa veille : c'était
alors que, dans le silence de la nuit et de la demi-obscurité que laissait
régner la veilleuse posée sur la cheminée et br?lant dans son enveloppe
d'alb?tre, elle voyait passer ces ombres qui viennent peupler la chambre des
malades et que secoue la fièvre de ses ailes frissonnantes. Alors il lui
semblait voir appara?tre tant?t sa belle-mère qui la mena?ait, tant?t Morrel qui
lui tendait les bras, tant?t des êtres presque étrangers à sa vie habituelle,
comme le comte de Monte-Cristo ; il n'y avait pas jusqu'aux meubles qui, dans
ces moments de délire, ne parussent mobiles et errants. Et cela durait ainsi
jusqu'à deux ou trois heures du matin, moment où un sommeil de plomb venait
s'emparer de la jeune fille et la conduisait jusqu'au jour. Le soir qui suivit
cette matinée où Valentine avait appris la fuite d'Eugénie et l'arrestation de
Benedetto, et où, après s'être mêlés un instant aux sensations de sa propre
existence, ces événements commen?aient à sortir peu à peu de sa pensée, après la
retraite successive de Villefort, de d'Avrigny et de Noirtier, tandis que onze
heures sonnaient à Saint-Philippe-du-Roule, et que la garde, ayant placé sous la
main de la malade le breuvage préparé par le docteur, et fermé la porte de sa
chambre, écoutait en frémissant, à l'office où elle s'était retirée, les
commentaires des domestiques, et meublait sa mémoire des lugubres histoires qui,
depuis trois mois, défrayaient les soirées de l'antichambre du procureur du roi,
une scène inattendue se passait dans cette chambre si soigneusement fermée. Il y
avait déjà dix minutes à peu près que la garde s'était retirée. Valentine, en
proie depuis une heure à cette fièvre qui revenait chaque nuit, laissait sa
tête, insoumise à sa volonté, continuer ce travail actif, monotone et implacable
du cerveau, qui s'épuise à reproduire C. L'apparition.. 163 Page 168 Le Comte de Monte-Cristo, Tome IV
incessamment les mêmes pensées ou à enfanter les mêmes images. De la mèche de la
veilleuse s'élan?aient mille et mille rayonnements tous empreints de
significations étranges, quand tout à coup, à son reflet tremblant, Valentine
crut voir sa bibliothèque, placée à c?té de la cheminée, dans un renfoncement du
mur, s'ouvrir lentement sans que les gonds sur lesquels elle semblait rouler
produisissent le moindre bruit. Dans un autre moment, Valentine e?t saisi sa
sonnette et e?t tiré le cordonnet de soie en appelant au secours : mais rien ne
l'étonnait plus dans la situation où elle se trouvait. Elle avait conscience que
toutes ces visions qui l'entouraient étaient les filles de son délire, et cette
conviction lui était venue de ce que, le matin, aucune trace n'était restée
jamais de tous ces fant?mes de la nuit, qui disparaissaient avec le jour.
Derrière la porte parut une figure humaine.
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