Eh bien ! soit, faites-le entrer. C’est un monsieur qu’on m’a présenté, dit Mme
de Villeparisis. Il m’a dit qu’il désirait beaucoup être re?u ici. Jamais je ne
l’ai autorisé venir. Mais enfin voil cinq fois qu’il se dérange, il ne faut pas
froisser les gens. Monsieur, me dit-elle, et vous, monsieur, ajouta-t-elle en
désignant l’historien de la Fronde, je vous présente ma nièce, la duchesse de
Guermantes. L’historien s’inclina profondément ainsi que moi et, semblant
supposer que quelque réflexion cordiale devait suivre ce salut, ses yeux
s’animèrent et il s’apprêtait ouvrir la bouche quand il fut refroidi par
l’aspect de Mme de Guermantes qui avait profité de l’indépendance de son torse
pour le jeter en avant avec Page une politesse exagérée et le ramener avec
justesse sans que son visage et son regard eussent paru avoir remarqué qu’il y
avait quelqu’un devant eux, après avoir poussé un léger soupir, elle se contenta
de manifester de la nullité de l’impression que lui produisaient la vue de
l’historien et la mienne en exécutant certains mouvements des ailes du nez avec
une précision qui attestait l’inertie absolue de son attention dés?uvrée. Le visiteur importun entra, marchant droit vers Mme de
Villeparisis, d’un air ingénu et fervent, c’était Legrandin. Je vous remercie
beaucoup de me recevoir, madame, dit-il en insistant sur le mot beaucoup : c’est
un plaisir d’une qualité tout fait rare et subtile que vous faites un vieux
solitaire, je vous assure que sa répercussion. Il s’arrêta net en m’apercevant.
Je montrais monsieur le beau portrait de la duchesse de La Rochefoucauld, femme
de l’auteur des Maximes, il me vient de famille. Mme de Guermantes, elle, salua
Alix, en s’excusant de n’avoir pu, cette année comme les autres, aller la voir.
J’ai eu de vos nouvelles par Madeleine , ajouta t-elle. Elle a déjeuné chez moi
ce matin, dit la marquise Page du quai Malaquais avec la satisfaction de penser
que Mme de Villeparisis n’en pourrait jamais dire autant.
Cependant je causais avec Bloch, et craignant, d’après ce
qu’on m’avait dit du changement son égard de son père, qu’il n’envi?t ma vie, je
lui dis que la sienne devait être plus heureuse. Ces paroles étaient de ma part
un simple effet de l’amabilité. Mais elle persuade aisément de leur bonne chance
ceux qui ont beaucoup d’amour-propre, ou leur donne le désir de persuader les
autres. Oui, j’ai en effet une vie délicieuse, me dit Bloch d’un air de
béatitude. J’ai trois grands amis, je n’en voudrais pas un de plus, une
ma?tresse adorable, je suis infiniment heureux. Rare est le mortel qui le Père
Zeus accorde tant de félicités. Je crois qu’il cherchait surtout se louer et me
faire envie.
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