-C'est le capital social d'un thé?tre de boulevard ou d'un chemin de fer du
jardin des Plantes à la R?pée. -Laissez-le dire, Morcerf, reprit nonchalamment
Debray, et mariez-vous. Vous épousez l'étiquette d'un sac, n'est-ce pas, eh
bien, que vous importe ! mieux vaut alors sur cette étiquette un blason de moins
et un zéro de plus ; vous avez sept merlettes dans vos armes, vous en donnerez
trois à votre femme et il vous en restera encore quatre. C'est une de plus qu'a
M. de Guise, qui a failli être roi de France, et dont le cousin germain était
empereur d'Allemagne. -Ma foi, je crois que vous avez raison, Lucien, répondit
distraitement Albert. -Et certainement ! D'ailleurs tout millionnaire est noble
comme un b?tard, c'est-à-dire qu'il peut l'être. , -Chut ! ne dites pas cela, Debray, reprit en riant Beauchamp, car
voici Ch?teau-Renaud qui, pour vous guérir de votre manie de paradoxer, vous
XXXIX. Les convives. 138 Page 142 Le Comte de Monte-Cristo, Tome II passera au
travers du corps l'épée de Renaud de Montauban, son ancêtre. -Il dérogerait
alors, répondit Lucien, car je suis vilain et très vilain. -Bon ! s'écria
Beauchamp, voilà le ministère qui chante du Béranger, où allons-nous, mon Dieu,
-M. de Ch?teau-Renaud ! M. Maximilien Morrel ! dit le valet de chambre, en
annon?ant deux nouveaux convives. -Complets alors ! dit Beauchamp, et nous allons déjeuner ; car, si je ne me
trompe, vous n'attendiez plus que deux personnes, Albert, -Morrel ! murmura
Albert surpris ; Morrel ! qu'est-ce que cela, ? Mais avant qu'il e?t achevé, M.
de Ch?teau-Renaud, beau jeune homme de trente ans, gentilhomme des pieds à la
tête, c'est-à-dire avec la figure d'un Guiche et l'esprit d'un Mortemart, avait
pris Albert par la main : ?Permettez-moi, mon cher, lui dit-il, de vous
présenter M. le capitaine de spahis Maximilien Morrel, mon ami, et de plus mon
sauveur. Au reste, l'homme se présente assez bien par lui-même. Saluez mon
héros, vicomte.? Et il se rangea pour démasquer ce grand et noble jeune homme au
front large, à l'oeil per?ant, aux moustaches noires, que nos lecteurs se
rappellent avoir vu à Marseille, dans une circonstance assez dramatique pour
qu'ils ne l'aient point encore oublié. Un riche uniforme, demi-fran?ais,
demi-oriental, admirablement porté faisait valoir sa large poitrine décorée de
la croix de la Légion d'honneur, et ressortir la cambrure hardie de sa taille.