suite.160; 9 Toute cette effervescence du roi de France, des Grands du royaume autour de l’envoi des vicaires et de la fondation de la Société, irrite rapidement Rome et la Propagande qui veulent garder l’entière ma?trise de cette aventure missionnaire. Rappelons que cette nouvelle politique menée sous l’autorité du Pape a pour objectif d’extraire les missions des patronats espagnol et portugais. On exige que l’envoi des missionnaires se déroule dans une plus grande discrétion pour ne pas provoquer la colère des deux rois patrons des missions depuis le xvie siècle et soulever la méfiance des puissances maritimes montantes hollandaise et anglaise. 10 Un climat de défiance s’établit envers la France. Rome se demande si ce grand zèle de la France pour les missions est porté par des motivations uniquement religieuses160;: ne cache-t-il pas des projets maritimes politiques et commerciaux plus ambitieux sous couvert de religion160;? ou, plus encore, n’est-il pas le signe de la volonté du roi d’établir un patronat fran?ais, une mainmise spirituelle sur l’action apostolique de ces missionnaires160;? 11 moitié du xvie siècle avait bénéficié du soutien de la papauté pour son aide aux missions capucines du Levant ou à celles des religieux au Canada. Mais à partir de 1659, date de la signature du Traité des Pyrénées et de la reconnaissance de la puissance fran?aise en Europe, de nombreux événements politiques et religieux entre 1659 et 1663 vont contribuer à faire na?tre cette défiance du Saint-Siège envers la France, qui La mise en place d’un contr?le de l’action du roi Louis XIV par Rome appara?t dès les premières années de cette nouvelle ?uvre missionnaire.
Le port de Lorient au mois de février 1690. Au premier plan, l’Enclos de la Compagnie des Indes. Au fond, la ville et la citadelle du Port-Louis et l’escadre des Indes en rade de l’?le de Groix.Le réveil missionnaire de la France dans la première moitié du xviie siècle 12 Avant de considérer cette courte période de 1659 à 1663 où s’établit ce contr?le romain du r?le du roi dans les missions, il faut se rappeler que l’éveil missionnaire de la France est récent et contemporain de la fondation en 1622 de la sacrée Congrégation de la Propagation de la Foi, année aussi de la canonisation de Fran?ois Xavier, Ignace de Loyola, Philippe de Néri160;; Rome manifeste ainsi sa volonté de reprendre en main toute l’activité missionnaire au début du xviie siècle. 13 Rappelons que les Fran?ais ont été très présents dans l’élaboration de cette fondation. Citons en particulier Jean de Vendeville, juriste de la Flandre fran?aise, le cardinal Souchier, abbé de Claivaux, défendant le r?le primordial du pape à évangéliser l’univers, comme l’affirmait déjà saint Bernard, et saint Fran?ois de Sales, évêque de Genève, pour qui la mission doit se faire par une 160;voie douce, paisible et assurée160;, pensée missionnaire que l’on retrouve dans certains écrits des membres de la Sacrée Congrégation, en particulier ceux Mgr Ludovisi, premier préfet de la Congrégation[9][9] Mgr Bernard Jacqueline, 160;La sacrée congrégation.. .suite. 14 Dès son origine, une solide complicité s’établit entre la Propagande et le père Joseph du Tremblay, capucin, grand acteur des missions fran?aises et éminence grise du cardinal Richelieu. Bénéficiant de la protection du cardinal Barberini, capucin lui-même, le père Joseph s’occupe en particulier de développer les missions fran?aises du Levant en y envoyant de nombreux capucins[10][10] ne suffit pas à expliquer cet éveil missionnaire de ce pays. Deux raisons majeures aident à comprendre cette expansion religieuse fran?aise outre-mer160;: la place particulière du roi dans le contexte des missions du Levant et le r?le joué par les grandes figures spirituelles de cette première moitié du xviie siècle, qui encouragent le départ en missions lointaines.Le r?le particulier du roi de France16 Tout d’abord, le r?le particulier du roi de France, qui depuis la signature des capitulations de 1535 entre Fran?ois Ier et le Sultan, est reconnu comme le protecteur des chrétiens en Orient. Reconnaissance confirmée en 1604, par les nouveaux traités signés entre Henri IV et le Sultan qualifiant la France de protectrice de tous les pèlerins se rendant en Terre Sainte ainsi que des religieux 160;qui demeurent en Jérusalem et servent l’église de Coumane160; (le Saint Sépulcre).
Sous le règne de Louis XIV, de nouvelles capitulations en 1673 ajouteront à cette fonction de protecteur celle de médiateur incontournable entre l’Empire turc et l’Europe catholique. De 1535 à 1740, douze capitulations sont ainsi signées définissant ce r?le particulier du souverain fran?ais dans le Levant, r?le reconnu et confirmé par Rome. 17 Les capucins re?oivent ainsi l’autorisation de la Propagande de s’installer au Levant, puis en Acadie, aux Antilles, sur la c?te africaine, en Nouvelle France. 18 Sur ce continent américain débute une autre aventure missionnaire fran?aise. Jésuites, Récollets fondent de nombreuses communautés chrétiennes parmi les colons et les Indiens du Canada et des Antilles. Ces religieux demandent l’aide de femmes religieuses pour s’occuper des h?pitaux, des écoles qui s’ouvrent dans les lieux de peuplement. Ainsi débarquent au Canada les premières Ursulines en 1639, accompagnées des premières Hospitalières de Dieppe.
