?Le prix de son sang ! murmura-t-elle. Oui, si je suis tué, dit en riant
Morcerf, mais je t'assure, bonne mère, que je suis au contraire dans l'intention
de défendre cruellement ma peau ; je ne me suis jamais senti si bonne envie de
vivre que maintenant. Mon Dieu ! mon Dieu ! fit Mercédès. D'ailleurs, pourquoi
donc voulez-vous que je sois tué, ma mère ?Est-ce que Lamoricière, cet autre Ney
du Midi, a été tué ?Est-ce que Changarnier a été tué ?Est-ce que Bedeau a été
tué ?Est-ce que Morrel, que nous connaissons, a été tué ?Songez donc à votre
joie, ma mère, lorsque vous me verrez revenir avec mon uniforme brodé ! ?Je vous
déclare que je compte être superbe là-dessous, et que j'ai choisi ce régiment-là
par coquetterie.? Mercédès soupira, tout en essayant de sourire ; elle
comprenait, cette sainte mère, qu'il était mal à elle de laisser porter à son
enfant tout le poids du sacrifice. ?Eh bien, donc ! reprit Albert, vous
comprenez, ma mère, voilà déjà plus de quatre mille francs assurés pour vous :
avec ces quatre mille francs vous vivrez deux bonnes années. Crois-tu ? dit
Mercédès. , Ces mots
étaient échappés à la comtesse, et avec une douleur si vraie que leur véritable
sens n'échappa point à Albert ; il sentit son cur se serrer, et, prenant la main
de sa mère, qu'il pressa tendrement dans les siennes : CVI. Le partage. 234 Page
239 Le Comte de Monte-Cristo, Tome IV ?Oui, vous vivrez ! dit-il. Je vivrai !
s'écria Mercédès, mais tu ne partiras point, n'est-ce pas, mon fils Ma mère, je
partirai, dit Albert d'une voix calme et ferme, vous m'aimez trop pour me
laisser près de vous oisif et inutile ; d'ailleurs j'ai signé. Tu feras selon ta
volonté, mon fils ; moi, je ferai selon celle de Dieu. Non pas selon ma volonté,
ma mère, mais selon la raison, selon la nécessité. Nous sommes deux créatures
désespérées, n'est-ce pas Qu'est-ce que la vie pour vous aujourd'hui rien. Qu'est-ce
que la vie pour moi oh ! bien peu de chose sans vous, ma mère, croyez-le ; car
sans vous cette vie, je vous le jure, e?t cessé du jour où j'ai douté de mon
père et renié son nom ! Enfin, je vis, si vous me promettez d'espérer encore ;
si vous me laissez le soin de votre bonheur à venir, vous doublez ma force.
Alors je vais trouver là-bas le gouverneur de l'Algérie, c'est un cur loyal et
surtout essentiellement soldat ; je lui comte ma lugubre histoire : je le prie
de tourner de temps en temps les yeux du c?té où je serai, et s'il me tient
parole, s'il me regarde faire, avant six mois je suis officier ou mort. Si je
suis officier, votre sort est assuré, ma mère, car j'aurai de l'argent pour vous
et pour moi, de plus un nouveau nom dont nous serons fiers tous deux, puisque ce
sera votre vrai nom. Si je suis tué... eh bien, si je suis tué, alors, chère
mère, vous mourrez, s'il vous pla?t, et alors nos malheurs auront leur terme
dans leur excès même.
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