Ce n'est pas chose rare sans doute qu'une pierre qui se détache sous le pied du
temps et va rouler dans l'ab?me ; mais, cette fois, il lui semblait que c'était
aux pieds d'un homme que la pierre avait cédé et qu'un bruit de pas arrivait
jusqu'à lui, quoique celui qui l'occasionnait f?t tout ce qu'il put pour
l'assourdir. En effet, au bout d'un instant, un homme parut sortant
graduellement de l'ombre à mesure qu'il montait l'escalier, dont l'orifice,
situé en face de Franz, était éclairé par la lune, mais dont les degrés, à
mesure qu'on les descendait, s'enfon?aient dans l'obscurité. Ce pouvait être un
voyageur comme lui, préférant une méditation solitaire au bavardage insignifiant
de ses guides, et par conséquent son apparition n'avait rien qui p?t le
surprendre ; mais à l'hésitation avec laquelle il monta les dernières marches, à
la fa?on dont, arrivé sur la plate-forme, il s'arrêta et parut écouter, il était
évident qu'il était venu là dans un but particulier et qu'il attendait
quelqu'un. Par un mouvement instinctif, Franz s'effa?a le plus qu'il put
derrière la colonne. ? dix pieds du sol où ils se trouvaient tous deux, la vo?te
était enfoncée, et une ouverture ronde, pareille à celle d'un puits, permettait
d'apercevoir le ciel tout constellé d'étoiles. Autour de cette ouverture, qui
donnait peut-être déjà depuis des centaines d'années passage aux rayons de la
lune, poussaient des broussailles dont les vertes et frêles découpures se
détachaient en vigueur sur l'azur mat du firmament, tandis que de grandes lianes
et de puissants jets de lierre pendaient de cette terrasse supérieure et se
balan?aient sous la vo?te, pareils à des cordages flottants.IV. ,
Apparition.44Page 48Le Comte de Monte-Cristo, Tome IILe personnage dont
l'arrivée mystérieuse avait attiré l'attention de Franz était placé dans une
demi-teinte qui ne lui permettait pas de distinguer ses traits, mais qui
cependant n'était pas assez obscure pour l'empêcher de détailler son costume :
il était enveloppé d'un grand manteau brun dont un des pans, rejeté sur son
épaule gauche, lui cachait le bas du visage, tandis que son chapeau à larges
bords en couvrait la partie supérieure. L'extrémité seule de ses vêtements se
trouvait éclairée par la lumière oblique qui passait par l'ouverture, et qui
permettait de distinguer un pantalon noir encadrant coquettement une botte
vernie. Cet homme appartenait évidemment, sinon à l'aristocratie, du moins à la
haute société. Il était là depuis quelques minutes et commen?ait à donner des
signes visibles d'impatience, lorsqu'un léger bruit se fit entendre sur la
terrasse supérieure. Au même instant une ombre parut intercepter la lumière, un
homme apparut à l'orifice de l'ouverture, plongea son regard per?ant dans les
ténèbres, et aper?ut l'homme au manteau ; aussit?t il saisit une poignée de ces
lianes pendantes et de ces lierres flottants, se laissa glisser, et, arrivé à
trois ou quatre pieds du sol sauta légèrement à terre. Celui-ci avait le costume
d'un Transtévère complet. ?Excusez-moi, Excellence, dit-il en dialecte romain, je vous ai fait attendre.
Cependant, je ne suis en retard que de quelques minutes. Dix heures viennent de
sonner à Saint-Jean-de-Latran. -C'est moi qui étais en avance et non vous qui
étiez en retard, répondit l'étranger dans le plus pur toscan ; ainsi pas de
cérémonie : d'ailleurs m'eussiez-vous fait attendre, que je me serais bien douté
que c'était par quelque motif indépendant de votre volonté. -Et vous auriez eu
raison, Excellence, je viens du ch?teau Saint-Ange, et j'ai eu toutes les peines
du monde à parler à Beppo. -Qu'est-ce que Beppo , -Beppo est un employé de la
prison, à qui je fais une petite rente pour savoir ce qui se passe dans
l'intérieur du ch?teau de Sa Sainteté. -Ah ! ah ! je vois que vous êtes homme de
précaution, mon cher !-Que voulez-vous, Excellence ! on ne sait pas ce qui peut
arriver ; peut-êtreIV.
阅读(117) | 评论(0) | 转发(0) |